Jamais avare d’une œuvre destinée immédiatement à rejoindre les oubliettes de la culture, Bernard-Henri Lévy a ébloui les spectateurs de 22 villes européennes au cours d’une tournée « triomphale ». Un marathon rendu indispensable en raison des « vagues de nationalisme, racisme, xénophobie et antisémitisme sans précédent depuis les années 1930 » à en croire le site dédié à la pièce écrite et interprétée par BHL. Un site officiel à bien des égards superflus avec la propagande médiatique d’une rare violence qui entoure ce spectacle d’une grande médiocrité.
Quand la culture rencontre la politique, cela donne une nouvelle œuvre majeure signée Bernard-Henri Lévy et intitulée « Looking for Europe ». Entre le 5 mars et le 21 mai, le philosophe auto-proclamé a foulé les planches de plusieurs villes européennes afin de tirer la sonnette d’alarme sur l’état de l’Europe et les maux qui la rongent. Un spectacle écrit par BHL lui-même ou BHL joue son propre rôle et d’exposer sa vision du continent européen. Un cocktail détonant qui n’avait aucune chance d’attirer les foules, mais qui a été un triomphe selon de très nombreux articles de presse relayés sur le site officiel de la pièce.
BHL, un génie du théâtre incompris ?
Si les oiseaux médiatiques qui s’adonnent à l’auto-promotion sont nombreux, BHL est l’expert incontesté en la matière. Lorsqu’il fait un long film sur la Libye (Le serment de Tobrouk), un navet qui n’a pas dépassé les 2 500 entrées malgré une promotion gigantesque au festival de Cannes 2012, c’est BHL qui apparaît sur tous les plans. Cette fois-ci, BHL a la main sur tout sauf sur le décor… Mais un seul acteur qui déblatère pendant plus d’1h30, assis à son bureau, ne demande pas des trésors de créativité artistique. Les véritables critiques ne s’y trompent pas comme ce journaliste travaillant pour le média allemand Der Spiegel dont le compte rendu de la pièce aurait pu passer inaperçu de ce côté du Rhin si Courrier International n’avait pas eu la bonne idée de traduire en français un article qui vaut le détour.
Entre jeu d’acteur mauvais et réflexions dignes d’un écolier de CM2, la pièce de BHL est un exemple parfait de bide international. Le journaliste note que la salle n’est pas pleine et que des spectateurs médusés par la piètre qualité de la pièce n’ont pas attendu la fin pour plier bagages. A cela, BHL répond sur son site Internet (un autre) intitulé La Règle du jeu : « et pourquoi pas des membres du public se jetant par la fenêtre ? Défonçant les portes des coulisses pour s’échapper ? S’arrachant les vêtements et se roulant par terre ? ». Un bel exemple de caricature pour nier une vérité qui déplait ? Quoi qu’il en soit, il est difficile de nier que deux représentations ont été annulées en Suisse faute de spectateurs…
Heureusement, BHL peut compter sur des soutiens de toujours à commencer par la télévision publique qui va financer un documentaire sur la pièce et cette tournée… Une information révélée par Le Canard Enchaîné il y a quelques semaines qui a permis de savoir que France 3 allait débourser la modique somme de 230 000 euros tandis qu’Arte mettra 200 000 euros au pot. Arte dont le président du Conseil de surveillance n’est autre qu’un certain BHL. Comme si les louanges délirantes d’une presse française unanime n’étaient pas suffisantes… Et pour se donner une idée du délirium, il faut se reporter au dernier article en date paru dans Paris Match.
On peut lire : « Parmi les invités qui se retrouvèrent pour le cocktail dans le foyer du théâtre, Ségolène Royal « époustouflée » ; Nathalie Loiseau, admirative ; Patrick Bruel, fan (…) Michel Drucker et Claire Chazal, dithyrambiques ; l’ex-ministre Philippe Douste-Blazy, impressionné (…) Anne Sinclair, subjuguée ; (…) Emmanuelle Seigner et Roman Polanski qui parla longuement avec BHL au milieu de la foule qui attendait pour congratuler le philosophe pour son incroyable performance »… Que du beau monde ! Au moins, on aura compris comment la salle parisienne fut remplie pour la dernière.